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Un coup de pouce pour l’avion électrique français : la force de poussée de l’aérodynamique !

C’est en 2019 que Christophe Airiau, enseignant-chercheur UT3 à l’IMFT, prend l’avion électrique en vol !

Impliqué dans une thèse INSA en tant que parrain de thèse, le directeur de thèse lui fait alors part du projet e-AIRchitecture, déposé 10 jours plus tard, et lui propose d’apporter ses compétences dans le domaine de l’aérodynamique. Les scientifiques engagés dans ce projet se servent jusqu’alors de modèles tirés d’ouvrages et il est bien temps d’impulser dans ce projet une connaissance vivante du domaine !

Il rejoint l’équipe en janvier 2020, où émargent huit organismes de recherche toulousains1, en lien avec le pôle Aerospace Valley. Ce pôle de compétitivité de portée mondiale, fondé en 2005, a pour thématiques l’aéronautique, l’espace et les systèmes embarqués. L’enjeu du projet est de travailler sur la nouvelle architecture de l’avion à propulsion électrique, alimenté par batteries équipées de piles à combustible. La propulsion résulterait de multiples moteurs électriques servant à faire tourner des turbines ou bien des hélices.

La cible de l’étude est un petit avion de 19 places, à vocation surtout régionale, présentant une autonomie de 150 à 500 km, et évoluant dans les aéroports situés en dehors des grandes villes.

Le 4 février 2020, un meeting organisé à l’IMFT entre les différents protagonistes présente les compétences réunies et fait un premier état de l’art en mécanique, en génie électrique et en conception aéronautique.  Le réseau va devoir statuer sur les technologies à utiliser, les limites à établir, les solutions à esquisser face aux problématiques posées.

La recherche est soutenue par le RTRA STAE à hauteur de 50 KEuros, qui finance essentiellement des stages de niveau M2 et de l’animation scientifique.

Le 30 septembre 2021, l’avancée du projet est présentée au monde industriel par les 9 équipes de recherche (https://nextcloud.isae.fr/index.php/s/SptPAJPCX5bwRgB). Un livre blanc consignant les problématiques techniques et économiques en lien avec l’avion électrique est en cours de rédaction, l’intérêt des chercheurs étant de se faire connaître auprès des PME/I et des start-ups du secteur. Le projet e-Airchitecture est prolongé jusqu’en juillet 2022 dans la perspective d’initier des collaborations scientifiques entre chercheurs et industriels.

Durant les deux ans du projet, les équipes travaillent sur quatre axes :

  • l’analyse du marché induit par l’avion électrique, avec un prix d’appel proche du billet de TGV (TBS/Isae-Supaéro)
  • le dimensionnement du système pendulaire de propulsion électrique  (Insa Ica/Isae-Supaéro)
  • l’intégration de la pile à combustible dans la propulsion d’avions légers de 6 à 19 passagers (Laplace/Enac/Isae-Supaéro)
  • l’optimisation et la simulation numérique d’une propulsion distribuée par moteur à hélice (IMFT/Cerfacs).

Concernant ce dernier volet, notons que la propulsion des avions actuels est assurée par 2 à 4 moteurs à hélice, éloignés les uns des autres. Dans le système distribué, l’avion compte 8 à 16 moteurs : des interactions d’écoulements générés par toutes les hélices se produisent alors, sans compter l’interaction aérodynamique sur l’aile modifiant la répartition des forces de portance et de trainée. Or si les moteurs sont alimentés par l’électricité, ils peuvent être commandés de façon autonome, ce qui induit la maîtrise de l’écoulement sur l’aile.

L’apport de l’IMFT concerne donc la conception de modèles venant simuler ce type de motorisation distribuée, encore en cours de développement. Un stage de M2 encadré par C. Airiau, au printemps 2021, a permis d’étudier numériquement l’influence de l’hélice sur la portance et sur la trainée, par logiciel libre (Openfoam). Cette étude paramétrique a pris en compte la géométrie (position hélice/aile et dimensions de l’hélice), la mécanique (caractéristiques de l’hélice), l’interaction réciproque écoulement/hélice et aile, afin d’établir les coefficients de portance et de trainée ainsi que la surface de réponse par rapport aux paramètres. Il s’agit d’une méthode statistique évitant des milliers de simulations en s’appuyant sur une séquence d’expériences. La présentation faite devant les industriels en septembre 2021 par l’IMFT et le Cerfacs (p.59-72) fait notamment référence à ce stage (https://nextcloud.isae.fr/index.php/s/SptPAJPCX5bwRgB).

Un nouveau stage de M2 devrait étudier l’interaction hélice/aile par approches analytiques et semi analytiques.

C’est un travail de fond exigeant qui attend donc Christophe Airiau et ses pairs, dans un domaine signalé comme particulièrement porteur, par le chercheur, dans le dernier rapport HCERES de l’IMFT. La Nasa travaille depuis 5 ans sur l’avion à propulsion distribuée et fait même voler certains appareils comme le Maxwell X57. Airbus va également lancer en 2022 un démonstrateur à propulsion hybride distribuée, en collaboration avec Daher et Safran, dans le cadre du projet Ecopulse (https://www.daher.com/daher-airbus-et-safran-sassocient-pour-developper-ecopulse-un-demonstrateur-davion-a-propulsion-hybride-distribuee/ ).

La recherche publique a pour perspective d’aider les industriels à accélérer la conception de cette nouvelle technologie où l’architecture de l’avion doit tenir compte autant de la motorisation distribuée que du système énergétique. L’enjeu principal pour les scientifiques est avant tout l’accessibilité des outils proposés aux industriels.

 Notes :

1 Isae-Supaéro, Enac, Insa-Ica, Laplace, TBS, Onera, Cerfacs, IRT St Exupéry