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Quand science et tradition coincent la bulle de Mezcal ensemble !

Dominique Legendre, Pr INP à l’IMFT, a contribué à l’article « Bubbles determine the amount of alcohol in Mezcal », paru cet été dans Scientific Reports de Nature. C’est un vrai cocktail de science frappé à plusieurs mains par des scientifiques de l’Université Libre de Bruxelles, de l’Université de Californie, de l’Université de Mexico et de Brown University. L’objet d’étude est le Mezcal, eau de vie mexicaine issue de la fermentation et de la double distillation du cœur de l’agave, une variété de cactus déjà appréciée pour ses vertus par les civilisations précolombiennes.
Embarqué dans cette aventure originale par le chercheur mexicain Roberto Zenit (Brown University) – collaborateur de longue date de l’IMFT – D. Legendre a apporté son expertise en simulation numérique en encadrant la thèse d’Omer Atasi, en cotutelle avec l’Université Libre de Bruxelles. Ce dernier a d’ailleurs reçu, pour l’excellence de ses travaux, le prix de thèse Léopold Escande et le prix Jean Nougaro de l’Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse.
Le Mezcal est majoritairement fabriqué de façon artisanale donc empiriquement. Roberto Zenit a voulu donner la parole à la mécanique des fluides pour interpréter un processus exclusivement basé sur l’observation et sur le savoir-faire traditionnel. Les distillateurs utilisent en effet une paille pour produire en surface des bulles dont la durée de vie va déterminer le degré d’alcool atteint : ainsi une bulle durant 10 à 30 secondes indique que la teneur en alcool est de 50%.
A l’aide d’expériences menées par R. Zenit et de simulations, la méthode ancestrale a pu être vérifiée scientifiquement, en mettant notamment en évidence le rôle des tensioactifs présents dans la solution : ils ralentissent le drainage du film constituant les bulles de surface et l’éclatement de ces dernières.
En s’appuyant sur le nombre de Bond adimensionnel comparant poussée d’Archimède et tension de surface, les chercheurs ont pu travailler sur la déformabilité des bulles et expliquer pourquoi elles sont stables quand elles atteignent environ 2 mm.
Cette découverte est applicable à d’autres domaines où la stabilité des bulles de surface est primordiale comme les écoulements volcaniques, les polluants situés sous les mousses, les réacteurs chimiques, et même la propagation de maladies infectieuses, sujet bien d’actualité.
Pour l’heure, les chercheurs pourraient l’appliquer à l’adaptant à la stabilisation des émulsions dans le cadre d’un travail post-doctoral lancé cet été par D. Legendre, en collaboration avec l’industriel Total. Citons aussi les recherches menées par R. Zenit et D. Legendre sur les bulles de champagne présentant des configurations en ligne tandis que celles du Mezcal se tiennent côte à côte.
Une recherche toute en légèreté, particulièrement bienvenue dans le contexte actuel, même si les phénomènes physiques impliqués sont des plus complexes.

Fabrication artisanale des bulles de Mezcal à la paille

Formation des "perles" de Mezcal en laboratoire

Sources vidéos : Brown University